Lorsqu’on parle d’addiction, c’est trop souvent à la drogue, à l’alcool, au sexe, au tabac… on oublie de citer parmi les dépendances, la dépendance à la chirurgie esthétique. Et pourtant, le comportement de certaines personnes qui font recours à la chirurgie plastique semble ne plus refléter le seul besoin de corriger une anomalie physique, mais de changer complètement d’apparence. A cet effet, elles multiplient les opérations de chirurgie esthétique et expérimentent parfois toutes les nouvelles interventions qui sont proposées y compris les plus dangereuses.Qu’est-ce qui justifie cette addiction à la chirurgie esthétique ?
La standardisation de la beauté
Tout se passe comme si désormais il existait un critère unique de beauté. Hier, la télévision constituait cet espace de présentation de cette beauté standardisée. Qu’il s’agisse des mannequins, des acteurs de cinéma, des présentateurs de télévision, etc., tout s’est passé comme s’il fallait absolument avoir un certain physique pour bénéficier dans le domaine professionnel de nombreux avantages.
Cette influence de la télévision s’est étendue à grande échelle, touchant de nombreuses personnes avec la venue des nouvelles technologies de communication et les réseaux sociaux. On parlait encore de ces jeunes accros à l’injection de Botox en raison des filtres-presses. Donc, à la poitrine bombée qui invitait à une augmentation mammaire, à la rhinoplastie pour avoir un nez plus fin, l’abdominoplastie pour avoir un ventre plat, l’augmentation du fessier pour un derrière bien galbé, etc., beaucoup n’ont pas hésité à se soumettre au diktat de la médecine esthétique en multipliant les injections de produits de comblements.
Le regard de l’autre
Mais si ce besoin de changer d’apparences limitait simplement à la correction des défauts physiques dont on souffre réellement, il n’y aurait pas une raison de s’alarmer. Le problème c’est que certains sont devenus tellement dépendants, une dépendance qui se manifeste par une constante insatisfaction. Chaque correction, pour paraphraser une célèbre pensée du philosophe Karl Jaspers, devenant une nouvelle correction. Être Homme dans ce contexte, c’est précisément être en route, chaque correction devient un nouveau défaut à corriger.
Ceci parque l’influence de la société, du regard de l’autre, qui, disait Sartre, m’oppresse, me chosifie, me rappelle en permanence que je ne suis pas assez ceci ou pas assez cela. En se laissant voir au prisme du regard de l’autre, on finit ainsi par céder à toutes les sollicitations qui viennent de l’extérieur. On n’est plus, on veut plaire.
Pour tout dire, l’aspect socio-culturel est un enjeu qui est négligé en chirurgie esthétique, mais qui pourtant commande la plupart des demandes des patients. C’est-elle qui est à l’origine de la notion d’insatisfaction qui elle aussi pousse certains à multiplier les opérations. N’est-il pas temps de réinterroger cette médicalisation de la chirurgie esthétique?