Tandis qu’ailleurs pour remplacer des dents manquantes, certains n’hésitent pas à recourir à la pose d’implants dentaires quel que soit le prix à payer parfois, en Afrique du Sud on ne se sent beau, on ne pense avoir un joli sourire qu’à condition de ne pas avoir toutes ses dents. C’est pourquoi, il y en a qui se font eux-mêmes arracher les dents de devant pour être plus beau. Une tendance à laquelle, hommes et femmes se livrent allègrement et avec empressement. Comment expliquer un tel phénomène ?
Le sourire des Cape Flat
Ils sont aujourd’hui nombreux au sein de la communauté « couloured », métisse, qui n’ont plus d’incisives. On pourrait croire qu’une mauvaise hygiène bucco-dentaire en est la cause, mais ce trou dans la bouche, ils se le sont fait eux-mêmes. C’est ce qu’on nomme avec joie dans les townships de la ville du Cap, le « sourire des Cape Flat ».
Le phénomène est transgénérationnel en Afrique du Sud. Hommes, femmes et petits enfants ado n’hésitent pas à se faire arracher les incisives pour se sentir plus séduisants. Wedaad raconte au micro de France Info, comment étant encore au lycée elle s’est faite arracher les dents de devant, « six d’entre elles » se souvient-elle sans aucun regret.
Le retrait dentaire, une pratique séculaire
Selon Jacqui Friedling qui enseigne à l’université du cap, et qui est l’une des rares personnes ayant porté sur ce phénomène un regard scientifique, en dit qu’il s’agit d’une pratique séculaire d’identification en Afrique. Selon elle, le retrait dentaire aurait été pratiqué autrefois dans bien de pays en Afrique et serait rentré au Cap « par les esclaves déportés au sein des colonies ».
La mutilation dentaire comme cette scientifique l’appelle, constitue encore un processus d’identification culturelle. Elle est ce qui permet aux jeunes de s’intégrer socialement. «Chez les plus jeunes, affirme-t-elle, c’est un peu un rite de passage pour être inclus dans la communauté».
Qui a popularisé le retrait dentaire dans le Cap ?
Mais à la question de savoir comment expliquer la résurgence d’une pratique historique qui devrait avoir disparu avec la fin de la colonisation, mais aussi face à une modernité qui décrète que l’un des critères de la beauté est d’avoir toutes ses dents, des dents blanches, la scientifique en attribue d’une part le mérite aux gangs qui l’auraient rendu populaire dans les townships et d’autre part, au « gouffre de la passion ». Le « passion gap » relève de cette croyance que les meilleurs baisers et autres plaisirs sexuels s’offrant avec la bouche, ne peuvent surgir que d’une bouche édentée devant.